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27 mai 2021

Au pays des sources

36703336-C911-4D5F-A65F-EDD43C0AD7E1.jpegLes  chemins étaient charmants et les pentes douces. Il y avait des pierres plantées, des rochers perchés, des sources cachées, de l’eau vive, des rivières naïves, des pics pas pointus, des landes souriantes, et même des forêts sans loup.

Nous nous demandions quel géant joueur avait jeté au hasard du paysage ces blocs de pur granit.

Plus modestement nous ajoutions en passant notre pierre sur les petits tas de cailloux au bord des sentiers.

Le soleil que l’on n’attendait pas était venu rien que pour nous, et nous allions libres comme le vent sous un ciel couleur bleu sud et des bouts de nuages blancs, par petites touches,  complétaient  le tableau.

Il y avait l’espace que l’on embrassait, l’air que l’on buvait, la terre que l’on foulait, et ces fleurs, des jaunes, des blanches, des bleues, que  l’on caressait des yeux.

Il y avait les amis, de longue ou fraîche date, ce petit groupe dont j’étais si fier d’être le guide en territoire connu.

Il y avait des rires, beaucoup de rires,  et tant de bavardages au rythme de nos pas, conversations d’une extraordinaire futilité ou parts d’intimité offertes en confiante amitié.

Il y avait aussi l’amour d’une vie, dans nos deux sacs à dos une presque existence, orages compris, tous ces jours, toutes ces nuits, ce long cheminement vers la paix de nos cœurs sinon celle des corps. Que ce bagage, en ces heures tendres, semblait léger !

Il y avait le passé que je retrouvais, les souvenirs de vacances, ces jours heureux à jamais présents, mon enfance, l’enfance de mes enfants, ce pays de Lozère où sont mes  racines enfoncées.

Il y avait la beauté que certains voulaient formuler pour la remercier et que d’autres n’osaient pas nommer de peur de l’effaroucher.

Il y avait même des embrassades spontanées, câlinothérapie  pour fêter le sommet, amicale mêlée en toute simplicité.

Et le soir sur les tables il y avait Tariquet et des îles flottantes. Et on flottait un peu, nous aussi, en regagnant nos chambres ...

 

Le lendemain de ces beaux jours, j’étais à nouveau dans le car qui m’amène au travail dans la grande ville. Changement radical de décor.

Pour adoucir la transition j’ai mis dans mes oreilles casquées la chanson que nous avions la veille écoutée ensemble à l’orée d’un bois de hêtres, regroupés sur un bout de clairière dans la lumière déclinante, peu avant le retour au village.

En repensant à tout cela pour en faire des mots, l’émotion fut trop forte : j’en ai pleuré, vraiment. Oh certes, ce fut très bref. Mais c’étaient  bien des larmes, là, dans ce car urbain,  sur mes joues un peu rougies la veille par le soleil du Mont Lozère.

Avoir été vivant en si bonne compagnie, avoir marché en si beaux paysages, avoir pu partager l’amour de ce pays, avoir goûté chaque minute et chaque pas : voilà ce que ces larmes ont dit furtivement.

D’un geste de la main je les ai essuyées, mais je ne les oublierai jamais.

Quelle chance nous avons, amis, amour, de connaître, et pour toujours, ces sources de joie pure !

Yves Gerbal, 27 mai 2021

 

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